La mobilité des personnes et des biens est un sujet qui préoccupe l’exécutif communautaire de Douala. Et parmi les moyens des transports, les plus utilisés figure le transport par motos taxi. La prolifération de ce moyen de transport dans les centres urbains du Cameroun est source de plusieurs maux dans la société. Pour assainir et professionnaliser ce secteur d’activité, les autorités administratives de Douala , la Communauté urbaine de Douala, les leaders syndicaux et MTN Cameroun ont initié plusieurs actions afin qu’on parvienne à un environnement sain et sécurisé. Le Dr Roger Djitchoua, 3eme adjoint au maire de la ville de Douala, qui est coordonnateur de ce programme au niveau de l’exécutif communautaire, revient sur le bilan de ce programme quatre mois après son lancement dans une interview exclusive.
Quel bilan faites vous du programme d’assainissement et de professionnalisation du secteur des motos taxi 4 mois après son lancement ?
Nous avons démarré l’opération d’enrôlement des motos taxi dans la ville de Douala le 11 juillet 2024. A ce jour nous sommes à près de 10000 motos taximen enrôlés, accompagnés dans la formation et l’obtention du permis de conduire catégorie A, sur un objectif de 20000. Il etait également prévu que ces derniers aient des chasubles pour la circulation. Rendu 4 mois après, nous avons réalisé 50% de notre objectif. Est-ce un bon résultat ? Nous voyons le verre à moitié plein. Nous pensons que vu la complexité de ce secteur d’activité de motos taximen, avec 10000 motos enrôlés, et ce qui est fait depuis des années nous sommes entrain d’avancer. Sur 10000 motos taximen enrôlés, nous avons distribué 1800 chasubles c’est ce qui justifie le fait que la ville ne soit pas encore colorée de manière permanente par les motos taximen vêtus des chasubles.
Pourquoi la ville accuse-t-elle ce retard dans la distribution des chasubles ?
Nous faisons face à des problèmes techniques, parce qu’il y’a un temps qui s’écoule entre l’enrôlement et la mise à disposition des chasubles. Cela dit, les 20000 chasubles sont disponibles, mais ils sont sans indicatifs, il faut d’abord : avoir toutes les informations sur le conducteur de motos taxi, lui créer son QR code et tous les numéros qui vont avec.
Nous accusons aussi le retard, parce que les motos taximen ont posé les problèmes déjà évoqués, mais qui reviennent pour des raisons pernicieuses à savoir : ” la place des logos des syndicats sur les chasubles”. Sur cette préoccupation la CUD a laissé le choix aux syndicats de poser l’ordre qu’ils auraient décidé de manière consensuelle, après que la CUD ait remis à leurs membres pour éviter que la ville se substitue aux syndicats. Mais également d’envoyer la liste de ceux déjà enrôlés.
Au regard de ces micmacs, la CUD et l’autorité administrative ont décidé d’ajuster leur décision pour laisser les marges de manœuvre aux syndicats.
Certains conducteurs de motos taxi continuent de rouler sans chasubles. A quand la fin de la sensibilisation?
La CUD permet à tous ceux qui ont été enrôlés de circuler même sans les chasubles de manière provisoire, grâce au SMS qu’ils reçoivent pour servir en cas de contrôle.
Voilà ce que la ville est entrain de faire, donc la sensibilisation ne va pas s’arrêter, elle va se faire auprès des motos taximen, et chez les usagers. Mais ce n’est pas parce que la sensibilisation n’a pas de fin que la CUD ne va pas passer à la phase répressive.
Nous observons que la phase répressive de ce programme tarde à s’implémenter. Est-ce un bras de fer avec les leaders syndicaux ?
Il faut reconnaître que cette phase a été retardée pour des raisons stratégiques. Soyez rassuré, cette phase sera effective, et toutes les dispositions sont entrain d’être prises. Nous savions qu’il devait avoir des écueils, des agitations,des grincement de dents et on en a eu. Mais, il faut souligner qu’il ne s’agit pas toujours d’un rapport de force, plutôt de mettre en avant le dialogue, les concertations. C’est dans ce cadre que le préfet du Wouri a tenu des réunions et elles se poursuivent au niveau de la CUD. Nous reconnaissons le rôle et les intérêts des leaders de motos taximen, mais nous leur disons de ne pas faire dans la surenchère. Il faut que ses leaders syndicaux comprennent qu’ils ne peuvent pas traverser une ligne rouge parce que certains parlent trop, d’autres outrepassent le rôle qui est le leur en cherchant à interférer dans les compétences de la CUD et les communes d’arrondissement.
Je veux rappeler ici que “la gestion de la circulation dans la ville de Douala est de la seule compétence la Communauté urbaine de Douala “. A cet effet, l’on ne saurait opposer au maire de la ville que cette compétence est du ressort des communes d’arrondissement. Cela voudrait dire que les syndicats ne maîtrisent pas la loi. Nous voulons leur dire de rester à leur place de leaders syndicaux, et qu’ils laissent la CUD qui est l’institution de gestion de circulation dans la ville faire son travail. Ils sont nos partenaires pour accompagner, et soutenir la ville et non pour entraver les missions du maire de la ville.
Sur le partenariat avec l’opérateur de téléphonie Mobile MTN Cameroun. Les leaders syndicaux souhaite savoir l’intérêt pour eux d’aborder ce chasuble aux couleurs et logo de MTN?
Merci pour cette question, il faut souligner qu’au moment du lancement de ce programme en 2021-2022, la ville a écrit à toutes les entreprises citoyennes de la ville de Douala en demandant leur accompagnement. Deux sociétés se sont prononcées à savoir : la CNPS et MTN.
Pour ce qui est de la CNPS, elle avait produit en son temps 700 chasubles, sous le couvert des leaders syndicaux, où l’on pouvait clairement voir le logo de la CNPS, j’ai envie de demander pourquoi n’ont-ils pas demandé à être payé? Que gagnaient les conducteurs de motos taxi ? Le problème ne se posait pas à ce moment. Aujourd’hui, le problème se pose parceque les chasubles sont distribuées gratuitement, contrairement à avant où c’étaient mis à disposition auprès des leaders syndicaux qui les vendaient à leurs membres. C’est donc un problème d’intérêt financier, les leaders syndicaux estiment avoir perdu de l’argent. La ville s’est montrée compréhensible et a pris des mesures consensuelles de compensation . Si les mesures ne sont pas suffisantes pour eux, qu’ils posent le problème autrement et non de s’attaquer au fondement de cette opération. Nous savions qu’en distribuant gratuitement les chasubles, ils perdraient ces ressources. Or, MTN qui est le partenaire de la ville dans ce projet leur donne de l’argent par personne enrôlée, et la CUD leur donne aussi de l’argent. Nous leur conseillons de ne pas faire de la surenchère, car c’est une opération noble, importante pour la ville, la bonne gestion de cette opération va accroître l’attractivité de la ville, la sécurité des usagers et des motos taximen. C’est donc un faux problème de faire croire à l’opinion que MTN et la CUD ne donnent rien aux syndicats. Et de tenir la ville pour responsable des faux problèmes qu’ils soulèvent.
A vous écouter les leaders syndicaux ne jouent pas franc jeu. Comment compter vous les ramener à la raison, en faisant respecter les zones interdites de circulation?
Nous sommes sur tous ces fronts, je veux rassurer les populations de la ville de Douala que rien n’a changé dans notre détermination. Du point de vu politique, le contexte s’est amélioré. Ce sont les hommes qui constituent l’exécutif communautaire donc il peut arriver dans l’application d’une mesure que l’on observe des difficultés, et on essayera de s’adapter. Je peux déjà vous annoncer que d’ici cette fin d’année, la CUD fera tout pour réduire voir éradiquer les agressions.
Comment appréciez vous les rapports de la la CUD et les leaders syndicaux ?
Par rapport au projet d’assainissement et de professionnalisation du secteur des motos taxi, je veux saluer les leaders syndicaux pour leur rôle d’encadreurs des acteurs de ce métier dans la ville de Douala et partout au Cameroun, car ils ont éviter le pire à plusieurs occasions. Ils jouent un rôle d’intérêt social. Le responsable de ce programme que je suis est en contact permanent avec ces leaders syndicaux pour recueillir leurs doléances. Je comprends l’engagement, la détermination que chacun met à apporter son soutien à la CUD. C’est la raison pour laquelle lors de la remise des chasubles à la place de la Besseke, j’ai personnellement demandé à ce qu’ils viennent me rejoindre sur l’estrade pour qu’ils soient célébrés. Je suis d’avis pour qu’ils revendiquent leur part dans le succès de cette campagne, tant dans la formation que dans la mobilisation et l’enrôlement des motos taxi. Certes le rapport syndicat- CUD n’est pas sain, amis nous souhaitons être accompagné dans ce programme.
Propos recueillis par Dim Dim